Rencontres
Laisser un commentaire

Marie Maurage, agricultrice urbaine et engagée.

Je contacte Marie Maurage par mail pour lui proposer de la rencontrer sur son exploitation parce que j’ai lu qu’à Marseille une ferme pédagogique a rouvert depuis un an au cœur des cités des quartiers Nord. Ça me semblait insolite, antinomique et en même temps tellement audacieux. Quelques minutes au téléphone pour comprendre que Marie est une femme passionnée par son métier et respectueuse de la nature et des hommes.

C’est après vingt ans passés à élever ses bêtes à Briançon que Marie décide de quitter sa montagne pour «passer à autre chose». Lorsqu’elle entend parler d’un appel d’offres de la ville de Marseille sur une de ses fermes pédagogiques, Marie n’hésite pas. La ferme en question est en piteuse état mais Marie y voit un fort potentiel. Depuis quinze mois c’est dans cette ferme des quartiers Nord que Marie s’est établie avec son troupeau. C’est une militante engagée qui produit du bio, et dans la ferme de la Tour des Pins elle a bien l’intention et l’ambition d’éduquer la jeune génération au «bien-manger». Marie est aussi présidente de BiodeProvence, la fédération régionale de l’agriculture biologique.

En arrivant, avec Lucie on se perd un peu dans le dédale des barres HLM de Marseille. Puis derrière le grand portail, l’immensité de cette prairie où paissent chèvres et agneaux. Un petit groupe d’enfants à gilet jaunes est en visite ce jour-là.

Marie nous accueille chez elle alors qu’elle déjeune avec sa fille Hannah. Il y Jojoba aussi le chienne malinoise, «possessive et hyperactive».

NOURRITURES-DELAIR-MMAURAGE-IMAGE1

 

Marie, pourriez-vous me décrire votre parcours jusqu’ici ?

J’ai été agricultrice en haute montagne, c’était un endroit idyllique dans lequel mes enfants se sont épanouis mais je n’avais plus de projet là-haut, j’avais fait tout ce que j’avais voulu et je ne me sens pas attachée à un endroit en particulier.

En 2013, j’ai vendu ma ferme et j’ai répondu à l’appel d’offres de la mairie de Marseille et ça ne pouvait être que pour moi !

La ferme de la Tour des Pins est une ferme pédagogique, en site classé, la mairie me met à disposition le domaine en contrepartie j’organise des animations pour les scolaires. Les thématiques varient en fonction de la saison, c’est la période des mises bas (février au moment de l’interview), les visiteurs pourront observer la naissance des chevreaux. Pas de production de fromage à cette période, ce n’est pas la saison.

NOURRITURES-DELAIR-MMAURAGE-IMAGE2NOURRITURES-DELAIR-MMAURAGE-Copyright-PHOTO-LucieCipolla-2

A quoi ressemble une journée de travail à la ferme ? Avez-vous
du personnel pour vous épauler ?

On travaille au rythme des saisons. J’ai repris la ferme il y a quinze mois et en début d’année la partie administrative est très importante surtout quand on est en phase de démarrage. L’affaire est loin d’être petite, il y a plusieurs volets différents, les animaux, la production de fromages et les yaourts bio, la vente, les animations, les papiers… Je trais, je fais le fromage mais il y a quelqu’un pour me segonder, de l’emploi a été créé.

NOURRITURES-DELAIR-MMAURAGE-Copyright-PHOTO-LucieCipolla-2bis

C'est la fin de journée, marie conduit les bêtes.

 

marie donne du foin au bêtes

Je ne suis pas ici par hasard, j’aime cette idée d’agriculture urbaine, je ne prétends pas pouvoir changer radicalement les habitudes alimentaires des Marseillais mais être en ville me permet de montrer la réalité de l’agriculture bio. Je cautionne l’idée d’une souveraineté alimentaire, il est important d’expliquer que l’homme ne pourra pas indéfiniment surconsommer des protéines animales. Mieux vaut manger de la viande occasionnellement mais de très bonne qualité.

Lors de la journée portes ouvertes de la ferme organisée par la mairie, c’était incroyable, il y a eu 450 personnes en six heures. Les gens étaient intéressés par mes produits parce qu’ils ont découverts la production artisanale, l’élevage de bêtes à taille humaine, la fabrication de fromage en petite quantité mais avec de bons ingrédients. Les gens manquent d’informations, l’agro-alimentaire a pris le dessus, il suffit d’interventions comme la mienne pour qu’il y ait une prise de conscience. En fait les gens sont boulimiques certes mais surtout d’authenticité, je trouve ça extraordinaire.

composition graphique

Concernant la jeune génération, comment pourriez-vous
leur communiquer vos « valeurs nutritionnelles » ?

J’aimerais que cette ferme soit un endroit de transmission pour les gamins des cités, j’aimerais les sensibiliser à la mal-bouffe. Il faut prendre ce problème à bras le corps, les gens continuent à s’empoisonner en mangeant des produits industriels mais ça ne coûte pas plus cher de consommer local. Néanmoins c’est un chantier colossal cette  notion d’éducation alimentaire, il faut changer ses habitudes, se remettre en question, s’investir.

De manière concrète, j’aimerais organiser ici des banquets populaires avec l’intervention de chefs qui pourraient expliquer comment cuisiner sans se ruiner, revaloriser la notion de rassemblement et de convivialité par la cuisine, alerter et informer les familles sur les dangers encourus par une mauvaise nutrition, l’obésité en l’occurrence.

On vit dans une ère où les outils de communication divisent les familles, la tendance est au chacun « face à son assiette » ce qui crée des ghettos culturels et alimentaires. Mais n’oublions pas que sociologiquement c’est très déterminant la nourriture. Si tu manges bien tu vis bien !

 

NOURRITURES-DELAIR-MMAURAGE-bottes

Ferme de la Tour des Pins
2 traverse Cade, 13014 Marseille
fermedelatourdespins.jimdo.com

photos©Lucie Cipolla

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s